Un jour d’hiver, juste avant le confinement, nous nous sommes rendues dans cet accueil pour les femmes de la rue, géré par le Samu Social. Nous sommes trois bénévoles, Béatrice, Coline et Laura, membres de l’équipe qui organise l’ouverture de l’Accueil Louise & Rosalie. Cette visite s’inscrit dans un chantier nommé « Visite d’accueil » dont l’objectif est de visiter d’autres accueils pour femmes afin de prendre connaissance des bonnes pratiques d’équipes expérimentées.
Devant la magnifique façade de l’Hôtel de ville de Paris, sur le parvis à gauche, figure une plaque discrète indiquant « Halte pour les femmes de l’Hôtel de ville de Paris ». Deux vigiles nous indiquent l’entrée de l’accueil. Après avoir gravi quelques marches, en laissant sur la gauche une très belle cour, nous ouvrons une porte vitrée. Une immense salle avec une très grande hauteur sous plafond s’offre à nos yeux où évolue une quinzaine de femmes, venues par elles-mêmes, par les maraudes du Samu Social ou le 115. Certaines sont assises un peu à l’écart sur des grands fauteuils, elles discutent, dorment ou se reposent. D’autres s’affairent sur une table et nous découvrirons plus tard qu’il s’agit d’un atelier de fabrication en carton des silhouettes des monuments de Paris, à positionner sur un plan pour se familiariser avec la ville. Enfin, des femmes prennent tranquillement un thé en bavardant, assises autour d’une longue table.
Françoise, la responsable de la Halte, nous relate avec vivacité, empathie et humanité son activité et celle de son équipe composée essentiellement de salariés et de stagiaires : d’abord l’accueil inconditionnel des femmes, sans les interroger, sans leur proposer tel ou tel service. D’abord l’accueil et le repos. Puis si la personne revient, il sera toujours temps de lui proposer de participer à un atelier ou de rencontrer le travailleur social, qui reçoit à l’écart dans son bureau pour plus de discrétion.
Il y a toujours de quoi manger à toute heure et prendre une douche si besoin. Nous visitons l’autre grande salle réservée aux femmes accueillies pour une nuit ou plusieurs. À cette heure-là, la salle est vide, elle est composée de près d’une quarantaine de lits séparés par des cloisons comportant des rangements pour quelques affaires personnelles. Parmi les femmes qui dorment sur place, l’une d’entre elles doit être opérée et elle restera là le temps nécessaire pour retrouver des forces avant et après l’intervention chirurgicale.
L’accueil est ouvert 7 jours sur 7 et 365 jours par an ! La responsable de la Halte est une femme d’une quarantaine d’années tonique et elle connaît bien toutes les femmes qui reviennent régulièrement. La Halte a développé beaucoup de partenariats pour des soins médicaux, des vêtements de rechange et la nourriture. Certains séjours sont même organisés en dehors de Paris, à la campagne ou en bord de mer. Les nombreux ateliers proposés (chant, dessin, théâtre, recherche d’emploi etc.) sont animés par des bénévoles tout au long de la semaine.
Il y règne calme et organisation : quel contraste avec le bruit et l’agitation de la rue de Rivoli voisine ! On ressent également la philosophie d’accueil fondée sur différents piliers :
- l’écoute et le respect du rythme de chaque femme accueillie,
- la volonté d’inclure chaque femme dans son cheminement pour sortir de la rue,
- la nécessité d’individualiser chaque situation,
- l’importance accordée à la dignité.
Une philosophie qui se résume dans cette phrase forte prononcée par Françoise : « La souplesse donne aux femmes un espace de liberté qu’il est important de respecter. »